voyage plongée KiritimatiVoyage plongée Kiritimati

Je suis à Kiritimati, le plus grand atoll du monde et peut-être le plus ancien, coincé entre lagon et océan. L’horizon est partout. Cette ancienne île Christmas, appartient à la république des Kiribati (33 îles réparties entre îles Gilbert, îles Phoenix et îles de la Ligne) dont la capitale est Tarawa-Sud dans l’archipel des îles Gilbert, à 3300 km d’ici (4 heures de vol)... Dive now !
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Reportages voyages

Mergui, l'archipel oublié

Inaccessibles depuis la seconde guerre mondiale, les îles de Mergui, énigmatiques et sauvages, ne se sont ouvertes aux croisières plongées que depuis 1997, après une longue et âpre négociation entre les TO qui opéraient en Thaïlande et le gouvernement du Myanmar. Un voyage qui fleure bon l’aventure tant au dessus qu’en dessous de l’eau.

Les festons vieil or d’une pagode jettent leurs derniers feux sur les quais animés de Kawthung. Dans l’assourdissant vacarme des "long tail boats", des dockers au torse tatoué attendent le prochain chargement, le regard perdu sur l’horizon brumeux. Un bonze drapé d’une toge lie de vin converse aimablement avec un groupe de douaniers désoeuvrés. Premières bouffées de Birmanie, ou plutôt Myanmar comme il convient de dire aujourd’hui. Parfum de mystère rehaussé d’indélicats remugles de poisson séché et de crevette faisandée. Il est grand temps de larguer les amarres avant de tourner de l’oeil. A peine sortis du port, voilà qu’une violente pétarade éclate à l’avant du bateau. Arraisonnement musclé de la marine birmane ? Abordage de pirates armés jusqu’aux dents ? Non, cérémonie bon enfant destinée à faire détaler les mauvais esprits. Excellente idée, que les fantômes nous laissent donc en paix, la route est longue jusqu’aux Mergui…

Entre 10 et 13 ° de latitude nord, plus de 800 îles s’égrènent au large des côtes de la province de Taninthayi dans le bleu pas très profond de la mer des Andaman. Cette mer n’est qu’une piscine dont les fonds n’excèdent pas 90m. Après trois heures de route, nous n’avons toujours pas plus de 5m sous la quille ! Les premiers émissaires de l’archipel apparaissent enfin : collines saupoudrées de forêt primaire d’où fusent les cris de perruches insolentes. La plupart sont inhabitées, certaines restent encore à explorer, tigres et éléphants sauvages en seraient encore les heureux locataires.

Sur Black Rock, minable bout de calcaire aussi nu qu’une météorite, il n’y a pas d’éléphants. Mais il y a mieux. A peine le temps de fureter le long du tombant sud qu’une singulière agitation saisit plusieurs plongeurs : borborygmes désespérés dans le détendeur, frénétiques moulinets de bras, palmage hystérique vers la surface, l’ambiance est chaude. Et pour cause : un ravissant requin baleine de 4m escorté d’un aréopage de rémoras et de cobias vient de surgir du vert. Affectueux comme un jeune toutou, il décide de s’entretenir avec chacun d’entre nous en tête à tête. On jurerait que la brave bête vient réclamer quelque caresse. Le voilà qui se précipite sur Eberhardt, un Allemand bâti à chaud et à sable, croyant sans doute retrouver là un parent éloigné. Quelle désinvolture ! Il faut vraiment faire quelque chose contre ces poissons trop familiers. Pendant ce surprenant carrousel, le soleil décline.




Les bonites à dos rayé, tels des loups en meute, harcèlent les bancs de fusiliers en raids fulgurants et décisifs. La masse de poissons ondoie comme une nuée d’orage de printemps, boule vivante explosant en big bang étincelant pour mieux se rétracter le danger passé. Aussi impavides que des bouddhas, des centaines (oui, des centaines) de poissons scorpions, seuls ou couples en aparté, sont rangés au milieu d’une pépinière d’anémones Heteractis magnifica ; chacune a déjà commencé à se calfeutrer pour la nuit dans son bleu manteau laissant à peine dépasser une timide mèche de tentacules. Un incident fort curieux survient alors que chacun se déséquipe sur le pont arrière, fort pressé d’aller soulager une vessie aussi gonflée qu’un poisson ballon apeuré. L’équipage commence soudain à gesticuler et à pointer du doigt le rocher à grands renforts d’exclamations diphtonguées. "There is a dog on the rock !".
 
On écarquille les yeux. Cette ombre là-bas, ne serait-ce pas… ? Une truffe, deux oreilles noires qui partent s’embusquer derrière un bloc, c’est bien un chien ! Que diable peut-il bien faire sur ce bout de rocher à des dizaines de km d’une terre digne de ce nom ? Un appel lancé à la radio nous donnera enfin la clé de l’énigme : notre valeureux roquet s’appelle "Dam" ("noir" en thaï), et il est tombé hier soir d’un des chalutiers qui ratissent les fonds alentour. Après avoir nagé plusieurs km et sans doute avoir bu la tasse une paire de fois, il est parvenu à reprendre patte sur ce bout de calcaire désolé. Le pauvret sera récupéré demain par son propriétaire. Voilà une aventure dont Médor se souviendra longtemps.

Au large de l’île Fletcher, notre route croise un vaste amas blanchâtre flottant en surface. Cela fait penser à un parterre de pétales d’orchidées qu’un bon génie des eaux aurait répandu à notre approche. En fait de fleurs, il s’agit tout bonnement de poissons crevés. Meurtrière efficacité de la dynamite. Si la Thaïlande a pris des mesures draconiennes (10 ans de prison pour le capitaine et saisie immédiate du bateau), le Myanmar ne brille pas encore par sa politique de conservation. Les bombes artisanales, genre de poteries remplies d’un mélange de fuel et de chlorates, sont fréquemment utilisées dans la région, le plus souvent par des pêcheurs thaïs, les seuls à avoir
vraiment les moyens de s’acheter ces matériaux qui viennent de Ranong, le port thaï à la frontière.

Blocs de coraux dégringolés dans le bas du tombant, cratères évidés à même le récif viennent parfois assombrir certaines plongées. Un ou deux milles plus loin, deux bateaux tout en bois mouillent à l’abri d’une crique. Sans doute nos dynamiteurs qui auront abandonné leur larcin à notre approche.Je monte à bord avec Zaw-u, le seul birman de notre équipage.

L’accueil est plutôt chaleureux. Certains occupés à lester leurs filets de galets ronds m’adressent des sourires ravagés par la noix de bétel. Un jeune coiffé d’un chapeau de paille, le kama, part à l’arrière me chercher un petit requin. Apparemment, ils ne pêchent pas pour les ailerons. Nos bonhommes viennent tous de Mergui (ou Myeik) le grand port de la région sur le continent. Six hommes par bateau, des campagnes d’une dizaine de jours, d’énormes containers de plastique où viennent s’empiler les poissons entre deux couches de glace pilée, un réchaud où finit de cuire une platée du riz, quelques couvertures bouffées aux mites …la vie à bord n’est pas forcément un conte de fée.

A Square rock, à une portée de fusil des 3 îlots "Scrooges", alcyonaires et gorgones ont le polype sain et gaillard. Premier arrêt sur un buisson de corail noir qui n’a d’ailleurs de noir que le nom. Au cœur des plumets floconneux, trois poissons fantôme arlequin attendent songeurs, la tête en bas, l’heure ducasse-croûte. Plus loin, une gorgone à nœuds déploie son éventail blanc veiné de rouge cinabre dans le courant. Un hippocampe à l’aspect souffreteux et égrotant s’y est enroulé la queue et tâche de rester digne malgré le flot qui le fait vaciller. Un petit tétrodon aux allures de dirigeable mord à pleines quenottes dans le cuir orangé d’une éponge encroûtante. Médiocre gueuleton que semble pourtant apprécier notre peu délicat poisson. Le voilà qui en recroque un bout. Toutes les roches ne sont hélas pas si "fleuries".

A Tower island, la roche exposée aux humeurs de l’océan, n’est guère colonisée que par un parterre de coraux mous nains et ce, à partirseulement de 15m. Très peu de madréporaires dignes de ce nom. Les micro algues vertes occupent le terrain et attirent des foules d’oursins. Ces derniers forment des essaims compacts aux piquants entremêlés, forteresses inviolables où vient parfois se vautrer un photographe étourdi. Comme je hais ces animaux. Il faut les voir en plongée de nuit trotter de tous leurs podia vers la source de lumière et se coller sans vergogne sous l’objectif au mépris de tout savoir vivre. Mais mieux vaut oublier ces infâmes créatures et lever la tête pour observer la danse des mobulas, gracieuses et farouches petites mantas.

Difficile de plonger aux Mergui sans croiser ce sympathique requin, que les anglais nomment zèbre et les Français léopard. Faut-il donc être imbibé de bière pour confondre des pois avec des rayures ! (A la décharge de nos amis d’Outre-manche, le juvénile présente de discrètes rayures jaunes). Dans la forêt de gorgones de Western Rocky, un bel adulte repose nez au courant sur ses pectorales. Un duo de rémoras collé sur sa tête lui fait comme une mèche élégante lissée sur le côté. Aussi paisible qu’un labrador assoupi près d’un feu de cheminée. Voilà de la plongée comme je l’aime. Il n’y a plus qu’à s’étendre sur le sable blanc le long de ses flancs carénés et regarder comme lui la fascinante parade nuptiale des seiches. Ah, nom de D…encore un oursin !

Christophe Migeon

Le tsunami aux Mergui
Alain, un français installé en Thaïlande depuis une quinzaine d’années est dive master à bord du bateau de plongée Faah Yai. Le 26 décembre 2004, il menait une balade en kayak de mer dans la mangrove de l’île de Lampi. "Vers 8h30, on a entendu 3 grosses détonations crescendo, et puis rien jusqu’à 10h, où nous nous sommes retrouvés d’un coup à sec avec les kayak au cœur de la mangrove. Après avoir retrouvé l’eau qui était de parcouru de courants très bizarres, nous avons regagné le bateau qui faisait la toupie autour de son ancre. Les marins m’ont dit qu’il y avait eu un mouvement d’eau de 2m d’amplitude environ. Ce n’est qu’en captant la radio vers 19h qu’on a appris la nouvelle. Il semblerait qu’il n’y ait qu’une poignée de morts sur les îles, en tout cas rien de comparable avec ce qui s’est passé plus au sud, vers Khao Lak par exemple où on déplore plus de 5000 victimes".


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